LA LICORNE


Définition :


          La Licorne est une Chimère… et la décrire est donc une gageure car, comme le dit le philosophe : « décrire la Licorne relève de l’essence et poser la question “existe-t-elle ? relève de l’existence, et ces deux discours sont situés sur des plans différents… »

Maj 12 juin : Ce que remarque aussi Faidutti dans thèse de doctorat (sur le Net…) : « La licorne n'est pas un animal mythique. Elle n'appartient en effet ni à la vaste ménagerie des mythologies classiques, comme le pégase, ni aux innombrables traditions locales contant la fondation des villes, comme le dragon. Comme le basilic, mais aussi le lion ou l'éléphant, elle relève moins d'un passé originel que d'un exotisme merveilleux. Son exploitation symbolique, sa présence bien tardive dans les allégories religieuses et courtoises, ne suffisent pas à en faire un mythe*. »


          Aussi nous préférerons chercher à savoir comment une telle chimère a pu voir le jour, quels télescopages ont eu lieu, et depuis quels “Sçavoirs” dégradés provenant de l’ancienne coutume païenne* ? Afin d’éviter quelques répétitions, on consultera avec profit les articles apportant notre si original “grain de sel” salasse* 1 à la description du Narval*, au concept de Justice* et par conséquent à la figure de Frigg (in art. Wotan*).



Étymologie* :


          Chercher l'étymologie de ce qui semble être un nom propre peut aussi sembler une gageure mais, après tout, il y bien une étymologie aux prénoms, aux patronymes, ainsi qu’aux noms des villes…
          On pensera en premier à la racine "corne" qui n'a pas besoin d'autre explication puisque son sens est transparent et que, par ailleurs, nous l’avons détaillée dans l’article Cernunnos*. Nous l’avons vue aussi à l’article Abondance* (cf. Amalthée).
          Ce pourrait donc être une corne de quelque chose : “une corne de Li” semble-t-il ? Le moins qu’on puisse dire est que cela ne saute pas aux yeux !…

          Cependant, un fil conducteur semble nous être donné par son nom médiéval de Lycornu car « il faut toujours chercher le vocable le plus ancien, ou la langue d'origine ! » nous dit un jour notre maître Georges Dumézil.

          Donc : ou bien c'est un Ly(s) qui est cornu, mais ils le sont tous, et puisque la corne de licorne est particulièrement droite, nous faisons fausse route ; ou bien c'est la corne du Ly ou de la Ly et, là, nous avons sans doute une piste car nous avons déjà vu cette racine médiévale venant du germanique – par nos ancêtres Francs – en étudiant – de notre “point de vue”– les Blasons* : c'est elle qui est à l'origine du nom de la fleur de ly(s) de ces ancêtres, comme étant “la fleur – le signe, le seing, le sceau – de la Loi” et donc, par conséquent, la Fleur du Roi qui en est le gardien, élu et sacré* (cf. aussi notre art. Irminsul*).
 
         
Ce Ly-cornu serait donc la "corne de la Loi" c'est à dire, sans doute, l'aiguillon : cette épée de la Justice* que le représentant de la Diète – l’Assemblée des Anciens – vous “met dans les reins” – ce que nous avons vu précédemment dans l’article “Justice”.
          D’autant que l’étymologie de ce “ly” pourrait venir de Lug/ Luce “lumière” ce qui n’est évidemment pas contradictoire puisque :

“C’est la clarté d’une situation qui entraîne la justesse de la décision !”


          Les Italiens appellent notre chimère lunicorno, ce qui est habituellement interprété comme “corne de la lune” ce qui pourrait indiquer un glissement iconotropique depuis la figure de la Vierge Diane. Mais nous devrons remarquer que lunicorno est aussi et surtout l’unicorno, l’Unicorne ! (ou Monocéros pour les grecs), autre nom de notre légendaire Licorne : toujours ces
jeux de mots signifiants du langage des oiseaux des Fideli d’Amore (cf. Troubadours et Chanteurs de la Mémoire “A–mor”, cf. art. Gioïa*).

          Chez les Égyptiens, précisons qu’un moncéros était un rhinocéros et que, bien plus qu’une bête dangereuse, c’était pour eux un antique signe… zodiacal !



Dans le christianisme médiéval et chez les trouvères :


          C’est alors que Rabelais nous emmena avec ses héros au “pays de laine frisée (Toison d’Or)n dans l’île de Frize2 (–> la Frise!) où l’une des trente deux (octo x 4) licornes émonde (cf. infra) une Fontaine avec sa corne” : l’émondage est un vieux rite* des plus utilitaires, ce pourquoi il est sacré*… et festif ; il subsiste donc dans toutes les légendes de “fontaines crées d’un coup d’épée”…
          Le sabot de la jument blanche Horsa – ancêtre archaïque de la Licorne – n’est pas loin non plus, lui qui fusionnera avec cette si utile tarière/ Rati qu’est la dent/ rostre bouclée à senestre du Narval*… “pour purifier l’eau des marets et des fontaines” (Panurge). C’est probablement à cette fusion – ou plutôt à cette confusion – que nous devons notre Licorne.

          Dans le Moyen-Âge finissant, nous sommes donc soudain dotés d'une nouvelle chimère qui
masque de vieux mythes cachés dans les récits des Trouvères, Minnesänger et Fidéli d'Amore et n'y servait qu'à l'initiation* discrète des amateurs de l’Ancienne Coutume de quelque châtellenie isolée.


          Dans ce Moyen-Âge chrétien, après les premières périodes de babélisation de la vieille culture nord-européenne qui suivirent l'Évangélisation, les Croisades et l’efficace Inquisition, la Licorne connut un effet de mode – principalement artistique – dû au cryptage de ce mythe païen qui ne voulait pas mourir et à la tentative chrétienne de permanente récupération.


“Animal” pré ou post-diluvien :


          Le fait que la Licorne soit souvent présente dans l’iconographie chrétienne de l’Arche de Noé montre-t-elle son rapport avec le déluge*, encore présent dans l’inconscient de l’époque ?
          Il nous ramènerait alors, une fois de plus, vers cette zone insulaire de la Frise qui fut submergée au XIIIème siècle AEC : c’est pourquoi, sans doute, notre licorne était déjà décrite par le Grec Ctésias dans son Opéra Indica en 398… AEC !


L'objet est… symbolique !


          Il n'est plus question de chercher un animal vivant ou ayant vécu3 et ressemblant aux figurations médiévales, fort variées au demeurant. Il s'agit bel et bien d'une chimère, si tardive que c'en est surprenant.

     
     Rappelons que, si « la corne torsadée est un symbole* de non-dualité ou plus exactement de dualité résolue », ce qui n’est pas évident, c’est précisément parce que cette vertu est l'objet de la Justice* sereine dont le Lycornu ou “Corne de la Loi” est la radieuse épée ! Mais… cette radieuse épée est celle du Paganisme* caché sous de poétiques* apparences !

          Comme confirmation, nous remarquerons que les textes médiévaux nous précisent bien que “la Licorne ne se laisse monter que par une Femme Sauvage couverte de plumes (cf. art. Manteau* de plumes), chevelure éployée et couronne fleurie en tête” ! Nous nous trouvons donc là devant une de ces métaphores poétiques (kenning chez nos ancêtres Francs) caractéristique de la cryptique Kala utilisée par les Troubadours et Minnesänger (cf. notre art. Gioïa*, la “Joie” du Troubadour) et l’on y verra au choix : Héra° la reine du Marais°, ou bien une de ses Walkyries°/ Dises° du Walburg° de l’archaïque Troja°, leur matrie ; tous personnages de Devineresse que l’Église* eut tôt fait de transformer en Sorcières*, car cette figure là est aussi un symbole du Paganisme* européen…


          Mais, son sens ésotérique réel fut réinterprété par la “mystique alchymique*” – d'inspiration chrétienne ou sous camouflage chrétien – après sa collision avec le Cheval blanc solaire et le jardin clos Hortus conclusus héritier de l’Asgaard des Dieux nordiques (confondu ici avec le Paradis* chrétien) tel qu'on le trouve dans la floraison des figures de Dames à la Licorne héritières de l'Amour courtois.



          Et, puisque nous verrons plus loin que notre Licorne suggère un Capricorne antérieur, ces deux figures typiquement païennes étant associées, la symbolique la plus certaine sera celle de la re-naissance du jeune Soleil lors de l’épiphania (“apparition”), celle de
ce Dieu-Fils solaire dont la Corne étincelante figure le premier rayon de la Neu-Helle (“nouvelle clarté”) au moment du Solstice d’hiver, Janus… janvier.



          On ne s’étonnera donc pas que la Déesse Terre de bien des illustrations médiévales reverdisse, que l’anthémœssa (“pré fleuri”) de son Jardin clos refleurisse et que, porteuse de la couronne de fleurs zodiacale du 1er Mai annoncé, du Cercle de l’Année fleurie, elle soit promesse des fruits de l’abondance* espérée de la Grande Saison.



La dent de narval du musée de Liverpool.
La sculpture date du XIIème siècle


La Renaissance : période décorative !


          À la Renaissance, période ou fleurissaient les légendes christianisées, on pensait que le pays du Ly-cornu était celui du prêtre Jean°, pays mythique jamais découvert… En fait, cette légende est issu d’un conte apocryphe de °Jean d'Arondel de la fin de la IIIème Croisade, vers 1190 qui, diffusé en français vers 1500, propagea cette superstition supplémentaire !




          L'imagination débridée des illustrateurs (on est pas forcément cultivé dans la vieille coutume parce qu’on sait dessiner) alors que l'édition commençait à se populariser, allait en faire une image perdant tout lien avec les sources du mythe*, car comment illustrer ce que les marchands décrivent comme étant un "bélier de mer", si ce n'est en dessinant une chimère, moitié bélier à corne unique ou doubles et moitié poisson, dauphin ou coquille de nautile, une sorte de Capricorne zodiacal fils de Neptune en somme – et ceci nous rapproche à nouveau du Pays du Solstice d’Hiver !

          Et, que dire de la précision surprenante de ces illustrations qui nous montrent la très longue corne conique d'ivoire spiralée et qui ne peut être que celle du Narval* (cf. notre art. séparé)…


On remarquera sur cette 13ème lame d’un Tarot allemand que
La Licorne “défend” l’Irminsul* contre le cataclysme nordique !


          On peut alors se poser la question de savoir si ce cheval blanc encorné n'était pas une réapparition de l'Alce sacré de nos ancêtres, tant Gaulois que Francs, de ce grand et vénérable Cernunnos* qui, sous le nom d’Eikthyrnir, domine et protège Asgard, la demeure des Dieux de nos ancêtres Francs, Burgondes, Vandales, Vikings ou Wisigoths, Cerf que, d’ailleurs, nous voyons souvent présent à l’arrière plan de ces illustrations4 tapissières avec son compère le Lièvre/ Hase (–> l’Ase/ le Sage) selon la Kala (prescription secrète) des Minnesänger (cf. art. Gioïa*) ?




          Quoi qu’il en soit, l'omniprésence de notre Licorne* dans les Arts provoqua à son tour la mode de la coiffure dite “à la Hénin5 ”, mode venue… du Nord : un long cône (“corne”), agrémenté d'un fin voile de lin si fin qu’il ne cache rien – “dévoiler en voilant” – un voile plus ou moins spiralé, lui aussi.



Le commerce avec l'Asie : confusions, résidus occidentaux ?


     
     La présence de la Licorne en Orient – telle que nous la connaissons – fut rare et tardive et ne fut que cette même mode propagée par les nouvelles voies commerciales. De ce fait, les apparentes similitudes avec des mythes indous (chignon) ou chinois sont dues à de mauvaises traductions (par des clercs), ou bien elles furent influencées par l'esprit de merveilleux propre à cette époque : on n’y voit en fait que ce que l’on désirait voir !

          Ainsi, dans les civilisations du
Moyen-Orient, à Our, un dieu anthropomorphe porte une grande corne sur le front : s'agit-il du "chevilleur", du "cloueur* du Pôle"  ? Sa qualité de dieu "cloueur du cosmos" qui en fait un dieu primordial (un Deus ex machina), pourrait expliquer la forme des chevaux ailés et des unicornes6 qui entourent l'Arbre de Vie à Sumer. Mais une technique de sculpture stylisée en “vue de profil” n’est pas non plus à exclure : nombre de chèvres ou d’antilopes vues ainsi ne nous montre qu’une seule corne alors qu’elles en ont deux !

    
      Aux Indes, une description de l'Atharva Veda pourrait aussi signaler ce symbole*, ainsi qu'à Marlik au Sud-Ouest de la Mer Caspienne en 1.000 AEC. On en parle donc plus tard dans le Râmâyana7 et dans le Mâhâbhârata, dans le Bundahish persan, ainsi que dans le Talmud8 des Hébreux.

    
      Chez les Arabes, c'est un lièvre° jaune avec une corne noire, l'al-mi'radj 9. Signalons aussi chez eux le très tardif carré de soie d'Aziza (–> Assina?) qui représente "une licorne brodée de fils d'argent et portant au cou un collier d'or rouge d'où pendent trois pierres de chrysolite".

          En Chine, on trouve le Hai-Ma qui est un cheval de mer (!) : son apparition devant l'empereur Fo-Hi (–> Fosit ?) aurait, dit-on, "favorisé" l'invention du Yi-King (!) puis celle de l'écriture archaïque chinoise10.
         
 Ainsi : « En 2285 AEC, en administrant la justice* chinoise, Kao Yao, un ministre impérial, lâchait une "licorne", Hsieh, sur les criminels. Sa corne longue et acérée transperçait les coupables car elle possédait la capacité de distinguer le bien du mal. Cet emblème de la justice* fut souvent peint sur les tribunaux. C'est elle aussi qui provoquait les éclipses : elle figure dans leur zodiaque à 28 signes équatoriaux. » Une explication en serait : « la découverte d'une sorte d'unicorne géant en Sibérie : l'élasmothérium sibericum (boeuf noir géant unicorne, de Melchior Neumayr) qui vivait voici deux millions d'année et ne semble avoir disparu que depuis 10.000 ans. Est-ce lui qui est encore célébré dans les vieux chants toungouzes? » Yvonne Caroutch, Le livre de la Licorne, Pardès 1995.

    
      Mais, pour notre part, nous ne le pensons pas car, quoique la date corresponde à la Grande Errance qui fit suite à la grande Catastrophe de 8500 AEC, il n'y a plus aucun lien ici avec la Justice*, fille des anciennes chefferies du Nord dont nous parlons dans l’article Narval* et dont nous nous entretiendrons plus loin ; mais les mythes* sont bien souvent le résultat de nombreuses collisions…

    
      « On peut se demander si la licorne européenne a des liens avec la licorne asiatique et ce qui les oppose. Les légendes ont probablement deux origines différentes: les licornes européennes portaient la corne du narval, tandis que les licornes asiatiques étaient des chèvres grimées: car, sur les hauteurs de l’Himalaya, se transmettaient les secrets de la fabrication des licornes en liant par le fer et le feu les cornes de certaines chèvres angora. Cette corne artificielle était courte et ressemblait à deux chandelles tressées (au XVIIIème siècle on en trouvait dans les cabinets de curiosités, mais elles sont moins estimées que les dents de narval). » Mireille Didrit, Maîtrise d’ethnozoologie [perso.club.internet.fr/nicus/LicorneO.htm] 1996.

         
 La "biche au chignon sacré" et torsadé de Bouddha est, quand à elle, nettement plus tardive. Peut-on dire qu'elle est un résidu, une colonisation de "l'ancienne coutume" des Chinois par un procédé analogue à celui qu’utilisa le christianisme chez nous ? Ou bien s'agit-il, dans ces cas de licornes orientales, de traductions "sollicitées" à une époque où les relations de voyageurs (Marco Polo et les évangélistes) avaient lieu – par hasard – à la même époque que notre mode des licornes occidentales ? C’est fort probable…


Témoignages “historiques” :


         
 Comment des voyageurs ont-il pu prétendre avoir vu des Licornes – si tant est qu’ils n’aient pas cherché sciemment à mystifier leur auditoire en parlant de pays fabuleux et de dangers imaginaires ? On sait, bien sûr, que de temps en temps une chèvre naît, programmée génétiquement pour ne porter qu’une seule11 corne, mais c’est si rare : Amalthée était-elle une de ces curiosités de la nature ? Nous ne le pensons pas car la célèbre nourrice de Zeus n’était pas un animal de cirque ou une chimère, mais sa chère nourrice devenue un symbole* de l’abondance*, comme la “vache à lait” puis, plus tard, celui de la Justice* “distributive” qui seule peut apporter l’abondance* à la communauté* tout entière.


Màj 12 juin 03 : « L'idée que les cornes de licornes utilisées en médecine avaient, au moins pour certaines d'entre elles, une origine marine n'apparut cependant qu'au XVIème siècle dans les écrits de Pierre Belon, parlant à leur sujet de «rouelles de dents de rohart », ou d'Andrea Marini constatant avec étonnement que ces cornes ne sont nulle part aussi nombreuses qu'en Angleterre et au Danemark. Le Théâtre de l'univers d'Abraham Ortelius, en 1570, puis l'Atlas Minor12 de Gérard Mercator et Job Hondius, paru au tout début du XVIIème siècle, furent les premiers ouvrages à restituer la corne à son légitime propriétaire, le narval; la description qu'en donne l'Atlas minor dans le chapitre consacré à «la mer d'Irlande» est succincte mais relativement précise, et exacte quant à la localisation et la nature de notre précieuse «corne»: «Le temps me faudrait, écrit le géographe, si je voulais réciter au menu le nombre de tant de poissons. Je ne mentionnerai que les plus rares. Entre lesquels est le Nahwal. Sa chair fait soudain mourir celui qui en mange, et a une dent de sept coudées sur l'inférieure partie de la tête. Aucuns l'ont vendue pour corne de monocéros, et croit-on qu'elle résiste aux venins. Cette bestiasse a quarante aulnes de longueurs. » Faidutti.


Origine du Mythe* :


         
 Toujours en observant attentivement les illustrations médiévales et les tapisseries de la Renaissance, on observe plusieurs particularités : la Dame à la Licorne est dans “une clairière fleurie” anthémœssa ou un “jardin clos” Hortus Conclusus près d’un arbre portant fruits et elle est entourée de “bêtes sauvages”, c’est donc un paradeisos, et près d’elle se trouve un panier de Pommes d’Or ce qui en fait incontestablement un renouvellement de notre vieille déesse Artio avec son ours solaire et son panier de fruits de science ou d’immortalité (cf. Musée de Berne).




         
 Remarquons bien qu’on trouve dans cette description ces éléments mythiques bien antérieurs au “paradis*” biblique apporté par le Christianisme et ceux-ci nous ramènent immanquablement à ce que nous avons vu dans l’article traitant de l’Atlantide* boréenne : une cité entouré d’une palissade, le Walburg, qui fut renversé par le déluge* nordique (une nuit de… Walpurgis ?), et aussi son Jardin Midgard avec ses Pommes d’Or de Sagesse, donc de l’immortalité des Dieux* (nos Ancêtres et aussi les “Dieux-concepts”), qui ne sont autres que les pommes de la Déesse Idunn en l’antique Avallon des Celto-Nordiques…


L'église tolère ce qu'elle avait si longtemps interdit :


     
     Cette mode des licornes qui envahi l'Europe fut probablement due au désir refoulé de s'intéresser à “l'ancienne coutume”. Sa redécouverte dans Ctésias (IV) et dans Le Physiologus au moment de la Renaissance permit d'échapper provisoirement aux interdits de l'Église* qui pourchassait la Corne de Justice de Frigg depuis si longtemps (car dans ce système déréalisant et dépréciatif du monde réel, il ne pouvait y avoir d’autre justice, que… Divine ) !
          L’Église était dorénavant persuadée que, ses racines étant coupées, elle pourrait laisser agir ce substitut christianisé : rien de tel que le merveilleux et la littérature pour “endormir le monde”. Ce procédé est la cause de beaucoup de nos superstitions et de nos légendes ou contes les plus embrouillés…


Histoire naturelle :


         
 Il n’y a évidemment pas d’Histoire Naturelle pour un Mythe ! Dès lors, comment s'y retrouver ? Deux détails de la description marine ont été conservés, ce sont la corne unique et la queue de dauphin qui, joints à l'étymologie du nom du marsouin – du norois mar-svin "cochon ou sanglier de mer" – sera notre piste : quel est donc l'animal – si tant est qu'il ait existé – qui a pu avoir ces deux caractéristiques : était-ce donc un cétacé… "armé" ?
         
 Eh bien, précisément, il en existe un, quoique plus jamais cité parce que diabolisé et, de toute façon, totalement absent sous nos latitudes depuis son extermination : c'est le courageux narval13 que, compte tenu de l’importance du sujet, nous étudions dans un article séparé : c’est la seule Histoire Naturelle qui existe et nous dirons même que c’est tellement évident, qu’on s’étonne de ne pas le lire plus souvent dans la littérature concernant la Licorne !



Dans la mythologie nordique :


         
 Parlant du Ragnarök/ Destin des Dieux, analogue à la Gigantomachie des Grecs, il est dit dans la mythologie nordique que Frey le Vane, et Belje s'affrontent, mais le Vane succombe devant Surt (le feu du volcan), armé qu'il est d'une seule ramure ainsi qu'un cerf à l'hallali » !
         
 Et, « pendant ce temps, malgré Gungnir la Longue Lance (le Ly-cornu gravé des runes de la Loi, de la “Parole donnée”, Spiegel)n, c'est Wotan* qui tombe dans la gueule du Loup, proprement "engamé par Garm", d'un seul coup (cf. § Guivre, art. Blasons* II). Mais Widar est là pour rétablir l'Ordre  : sortant de la forêt sur son coursier d'une immaculée blancheur, il pointe en avant la fulgurante épée de lumière Helgi ! » (cf. dans le monde Grec : Élicée, Hélix…)

          Ainsi, l'image du cerf "massacré" (cf. art. Cernunnos et Blasons* II) se conjugua-t-elle au Moyen-Âge avec celle de Frey, le roi "libre" de la chefferie Vane et son épée, la dent de Narval*, pour donner naissance à notre chimère la Licorne, renouvelant ainsi le Capri-corne ou "bélier de mer" de la Neu Helle/ Épiphanie pour la Nouvelle Clarté épiphanienne… Helgi :

          « Le troupeau de “phoques” de Posites/ Poséidon est gardé par Protée “le premier” qui sait tout sur “les débuts du monde” (initiæ)n. Ils sait l’art de se métamorphoser (transformations druidiques/ niveaux initiatiques)n car il est protéï…forme ! »

          Comme nous le pressentions, nous voici donc devant la vraie Licorne : Widar, en pleine puissance, sur un blanc coursier, la lumineuse épée de Lumière solaire Helgi spiralée d'un serpent de sang, bien calée sur sa Targe : il charge pour la joute finale : c’est alors le Ragnarök sur la Lice, le Destin des Dieux se joue là, ce que Richard Wagner appellera leur Crépuscule !


Constellation :


          On retrouve ce Lycornu/ Helgi dans “l’épée de lumière sur le baudrier d’Orion” et qui est aussi nommé la Frija rokr ou “Quenouille de Frigg”. Et, ce Sagittaire s'appelle Dhanus14 (!) aux Indes où il est représenté par une … licorne* !
     
Comme figure entière, la constellation de la Licorne se trouve entre le Canis Major et le Canis minor, le Grand et le Petit Chien (cf. Fenrir)…



Ce cheval blanc, Lycornu, ne semble-t-il pas émonder la source
qu’il vient de “faire jaillir” en grattant le sol de son sabot °(cf. aussi art. Narval)*.



Màj 12 juin 03 : « L'épée de Charles le Téméraire, dont le pommeau est effectivement taillé dans une dent de narval, et dont le fourreau s'orne de plaques du même ivoire, est exposée aujourd'hui au Schatzkammer Museum de Vienne, avec une corne de licorne qui serait aussi venue de la cour du Téméraire, dans la riche dot que Marie de Bourgogne apporta, en 1477, à l'empereur Maximilien. » Faidutti.



Dicton :

Rappelant le rôle essentiel de conciliatrice de la Justice* païenne on disait :


“Lorsque deux hommes veulent se tuer, Le Lycornu se met entre eux !”


          C'est ce qui explique que la courtoisie15 voulait qu'un duel à l’épée ait lieu "au premier sang" et non “à mort” !



Conclusion :


          « Le Speculum Regale, texte scandinave datant du milieu du XIIIème siècle, donnait quelques descriptions de ces monstres terribles qui étaient sûrement des cétacés, qui détruisaient les navires et les hommes, et alimentaient les légendes. » Mireille Didrit, cit.
          Ambroise Paré, ne croyait pas en leur existence et pensait qu’elles étaient des défenses de "rohart", c’est-à-dire de morse. Constatant “l’effet de mode” sur la qualité de la foi en son existence, il a écrit « La licorne est en bruit, nonobstant sa cherté : Tant le peuple est aisé à tromper et séduire. »
          Il n'hésita pas à affronter médecins et apothicaires en condamnant l'usage de sa corne comme «alexitère» mais, il s'attira les foudres de l'Église* (!) pour avoir détruit en 1582 la superstition qui accordait une action antivenin à la “corne de Licorne”.
          Cependant, on l'utilisa jusqu'en 1789 encore à la Cour de France, donc durant encore deux siècles (!) : les manches de couteaux étaient en "licorne” et on les trempait dans le vin avant de le boire car ils étaient sensés (?) “noircir dans les boissons empoisonnées qui se mettaient alors à bouillonner” (Ah, quelle charmante époque c’était là…)…

          Wormius et Frédéric Martins révélèrent la véritable origine de la corne de licorne, mais les “valeurs* marchandes” propres à la Compagnie du Grœnland entretinrent la légende pendant encore plus d’un siècle, entraînant ainsi la disparition16 totale du narval* dans notre Mer du Nord.

Et, déjà en 1930, Odell Shepard suggérait bien avant nous, dans son livre The lore of the unicorn (Boston), que :

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Petite bibliographie+ complémentaire :

ASTORG Bertrand d’, Le mythe de la Dame à la licorne, Seuil, 1963.
La licorne alchimique, Ed. philosophiques, 1981.
CAILLOIS Roger, Le mythe de la licorne, Fata Morgana 1991.
CHEVALIER & GHEERBRANT, Dictionnaire des symboles, Laffont,1982.
CLEBERT Jean-Paul, Dictionnaire du symbolisme animal, Bestiaire fabuleux, Albin Michel, 1971.
ERLANDE-BRANDENBOURG, La dame à la licorne, Paris, 1978.
Maîtrise d'Anthropologie sociale et culturelle Note de recherche d’Ethnozoologie : Licorne de Mer ou Licorne de Terre : le Narval*, par Mireille DIDRIT, dirigée par Raymond PUJOL (septembre 1996)
Bruno Faidutti Thèse de doctorat del'université Paris XII - Sciences littéraires et humaines.


Première parution le 7 janv. 2001, 3ème mise à jour le 12 juin 2003






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